dimanche 5 avril 2015

House of Cards - Saison 3, de Beau Willimon (2015)

House of Cards - Saison 3, créée par Beau Willimon, avec Kevin Spacey, Robin Wright, Michael Kelly, Michael Kelly (13 épisodes de 52 min)

Synopsis 

A peine parvenu à accéder au poste de Président des États-Unis, Frank Underwood doit déjà se tourner vers la présidentielle de 2016, alors même que son accession au trône demeure fortement discutée. Appuyé par l'indéfectible soutien de sa femme Claire, le nouveau Président voit en outre s'entasser sur son bureau de nombreux dossiers politiques épineux...

Attention, cette critique contient des spoilers.

La critique de Boschomy

Ça y est, son plan a été réalisé, ses vœux exaucés. Au terme d'une manœuvre somme toute incroyable, Frank Underwood est devenu Président des États-Unis. Le parcours fut semé d'embûches, les opposants furent tenaces mais la volonté du politicien démocrate a triomphé de toute résistance. On peut dès lors penser que le plus dur a été fait, mais ce serait bien trop sous-estimer les rouages pervers du système politique américain... Oh non, l’intronisation de Frank Underwood n'est pas une fin en soi, mais bien plus le commencement d'une épreuve décisive : rester au pouvoir, alors même que les prédateurs politiques rôdent et que la course à la présidentielle de 2016 commence déjà à faire rage. C'est tout l'enjeu de cette troisième saison de House of Cards, qui se place sous les auspices les plus obscurs et les plus pervers, rien qui ne devrait donc dépayser les spectateurs familiers du show.

Le nouveau paradigme de cette saison, qui place Frank Underwood non plus en prédateur, mais davantage en proie, fait tout l'intérêt d'une trame scénaristique amplement renouvelée. Sous l'impulsion du renversement des rapports de force, c'est un spectacle inédit qui s'offre à nous, délivrant une vision radicalement neuve des relations qu'entretiennent les personnages entre eux et vis-à-vis de leur environnement. Si le protagoniste campé par Kevin Spacey ne perd rien de son cynisme acerbe ni de son génie machiavélique, il évolue dans un rôle tout neuf, celui de Président des États-Unis. Fini donc les stratagèmes outranciers, il est temps de faire place à des manœuvres plus subtiles, de faire preuve de démagogie à visage découvert, de gérer un agenda étriqué... En somme, House of Cards délaisse, un tant soit peu, ses escapades fictionnelles pour se recentrer sur une description plus réaliste de l'univers politique, dévoilant de nombreux aspects techniques de la fonction suprême : gestion des dossiers internationaux (le bras de fer avec les Russes est d'autant plus réussi qu'il fait largement écho à la situation tendue entre l'Occident et la Russie aujourd'hui), course à la présidentielle 2016, obstruction politique des Républicains, vindictes de la presse... Le quotidien présidentiel est bien représenté, plaçant Frank Underwood aux prises avec des relations de pouvoirs bien plus complexes qu'auparavant : le personnage en sort grandi, et la trame narrative aucunement affaiblie.

Cette nouvelle saison est aussi l'occasion de redonner une certaine prestance aux personnages secondaires, qui viennent graviter plus ou moins loin de l'orbite du nouveau Président. Le personnage de Claire Underwood (que Robin Wright incarne à la perfection) connaît une métamorphose d'ampleur et un étayement psychologique conséquent, et s'avère être l'alpha et l'oméga de cette saison. D'autres personnages connaissent également une évolution intéressante : on retrouve un Doug Stamper à fleur de peau, en proie à de nombreux dilemmes, ainsi qu'un nouveau protagoniste en la personne de Tom Yates, qui s'avère être un trait d'union permanent entre la sphère du pouvoir et celle des relations intimes de Frank Underwood. Détachée de l'omnipotence de son personnage principal, la saison retrouve un point d'équilibre qu'elle avait perdu de vue précédemment : le drame politique l'emporte lentement mais sûrement sur les sursauts fictionnels. Certains regretteront alors les grands coups d'éclat scénaristiques qui ont marqué la série jusqu'ici, une frustration compréhensible, car il est difficile de ne pas voir dans cette saison 3 un prélude à l'escalade provoquée par la course à la présidentielle de 2016, ce qui ne l'empêche pas d'être jalonnée de ses insaisissables moments de tension et de ses coups bas vicieux mais rendus délectables par le charisme arrogant de nombreux de ses personnages.

Enfin, House of Cards s'affirme encore et toujours comme irréprochable d'un point de vue formel : la réalisation est ultra-soignée, la photographie lumineuse, le casting exemplaire et on ne pourra définitivement jamais se lasser de ces regards caméra qui font du spectateur le confident choyé du Président Underwood. House of Cards évolue, et dans le bon sens, s'écartant d'une redite qui lui aurait été préjudiciable suite au fracas de la saison précédente, mais sans pour autant perdre son identité originelle. Entrée dans une phase de maturation qui laisse présager le meilleur, la création de Beau Willimon installe son hégémonie sur le monde des séries dramatiques. Comme quoi, Frank Underwood n'en a jamais fini de nous surprendre...

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